S'il
vous arrive un jour de croiser un polonais et de pouvoir parler avec
lui, demandez-lui si par hasard, il ne connaîtrait pas un certain
Karabatic (parler sport avec un étranger rompt toujours la glace de
manière particulièrement efficace...). Il vous répondra très
certainement par un 'Nikola ?' malicieux, démontrant ainsi à
la fois qu'il connaît le prénom de la personne en question, et
qu'il sait qu'il aurait tout aussi bien pu s'agir de son frère,
Luka...
Le
handball est en effet un sport très populaire en Pologne, et il est
tout naturel de connaître les champions de la discipline :
aussi est-il actuellement difficile de ne pas connaître 'LE' joueur
star de l'équipe de France (même si, rappelons le tout de même, ce
dernier est né en ex-Yougoslavie...).
Malgré
la démesure du sport phare planétaire (le foot bien sûr!) qui se
développe comme une vague de conversion dans les pays d'Europe de
l'Est (souvenez-vous d'ailleurs d'où s'est déroulé l'Euro 2012...), d'autres
sports résistent encore bien dans ces pays où l'on n'en est pas
encore à presser des foules en liesse devant des arcs de
triomphes.....
... à ceux qui avaient donc parié sur une manifestation
de supporters de l'équipe nationale de foot pour expliquer ces
drapeaux lituaniens, la raison reste à chercher ailleurs..... mais
pas si loin.
En
effet, il ne s'agit pas non plus d'un jour de deuil national ou de
devoir de mémoire ou autre fête nationale (pour l'instant!), mais
bel et bien d'une expression de supporters de sport au ballon rond
avec lequel on ne jouerait toutefois pas au pied...
De
même qu'à l'évocation d'un Zidane ou d'un Karabatic, le lien
sportif est rapidement dressé, évoquons alors le patronyme d'une
figure sportive légendaire lituanienne : Arvydas
Sabonis.
...
Vous
remettez ?
…
Un
des plus grands joueurs de tous les temps de l'histoire du....
du.... ?
... non ? toujours pas ?...
Bon,
voici quelques indices supplémentaires qui devraient vous aider à
palier à ce fâcheux trou de mémoire.....
(caricature photographiée à Kaunas)
(totem photographié en campagne, dans l'Apskritis de Kaunas)
Et
maintenant ? :-)....
... oui, cela vous revient à présent.... évidemment....
Comme vous le dites, comment ne vous en êtes pas souvenus plus tôt ?...
Arvydas Sabonis est effectivement un 'dieu du basket', véritable légende
pour le peuple lituanien...
Comme
bien souvent, un sportif devient légendaire parce qu'il incarne au
delà de lui (et parfois aussi 'malgré lui') des enjeux politiques
bien plus vastes que le simple combat de l'épreuve sportive auquel
il est confronté : ainsi des Jesse Owens médaillé aux jeux
olympiques au cœur de l'Allemagne nazie, des John Carlos et Tommi
Smith aux poings gantés de cuir brandis aux jeux de Mexico, des Emil
Zatopek coureur phare d'une Tchécoslovaquie étriquée, des Cathy Freeman icônes
d'Australie et porte drapeau aborigène, pour ne citer qu'eux... si
Sabonis est devenu à son tour l'icône d'un pays, c'est, au delà de
ses statistiques stratosphériques, aussi et surtout parce qu'il a su
cristalliser lors de son apogée (années 80 et 90) les aspirations
de son pays : des aspirations nationalistes évidemment...
Revenons
d'ailleurs à cette époque pour rappeler ce contexte... dans ces années 80, un club domine de toute sa
puissance le championnat de Russie : le CSKA, qui n'est autre
que le représentant de l'armée rouge dans la discipline... l'équipe
moscovite écrase tout : en 1985, elle s'apprête en effet à
engranger un dixième titre consécutif... seulement voilà, ce
dixième titre lui échappera : ce dernier est en effet raflé
par une équipe 'de seconde zone'... le Zalgiris Kaunas.....
(caricature photographiée à Kaunas)
Cette
année là, ce club est pulsé par un jeune prodige de tout juste
vingt ans : vous aurez deviné qui....
Il
faut alors imaginer le retentissement que pourrait avoir cette
victoire : un club lituanien qui défait l'équipe de l'armée
rouge au basket, même les rencontres footballistiques de légendes
risquent de ne pas pouvoir souffrir la comparaison... et s'il ne
s'agit pas encore d'irruption volcanique pure, disons que les plaques
ont déjà bien été secouées une première fois...
… et
lorsque cela se renouvelle les deux années suivantes, il n'en faut
pas davantage pour que tout un peuple se presse derrière son équipe.
Après
le retour de l'indépendance, la ferveur lituanienne pour le basket
ne s'est pas estompée : les médailles olympiques de bronze
glanées aux jeux d'Atlanta puis de Sydney (au cours desquels les
lituaniens auront joué une demi-finale de légende contre rien de
moins que les États-Unis (perdue 81-82 sur un panier raté dans les
dernières secondes)) ont alimenté la flamme, et celle-ci est
toujours bien vivante aujourd'hui.
Et
si en cet été de 2011, un très grand nombre de maisons
lituaniennes arborent si fièrement les couleurs de leur pays, c'est
tout simplement parce que la Lituanie connaît alors une consécration
particulière: avoir l'honneur d'accueillir pour la vingtième année
de son indépendance le championnat d'Europe de Basket !
C'est alors naturellement tout un peuple qui se joint derrière son équipe..... et qui à l'unisson dresse les couleurs du pays...
CQFD.
(Nous ne pouvions tout de même pas quitter le pays sans évoquer cela : un lituanien ne nous aurait pas pardonné...... à présent que c'est chose faite, rdv dès la semaine prochaine pour entrer enfin en Lettonie !)
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