Liepāja n'est malheureusement pas un endroit propice à
se résoudre à laisser l'appareil photo dans sa poche... car Liepaja est certes
spectaculairement fripée, décrépite, usée, mais elle est aussi et surtout
diverse et particulièrement vivante... et c'est un mélange touchant.
Liepāja est tout d'abord diverse en son architecture.
Nous pourrions parfois croire déambuler dans les coulisses d'un grand studio de
cinéma, empruntant tour à tour, des allées d'art nouveau et de baroque, des
boulevards de Manhattan et des ruelles sinueuses de villas méditerranéennes...
le visiteur se perd sans transition dans des quartiers où se mêlent maisons
ouvrières de briques, barres d'immeubles soviétiques et cathédrales orthodoxes
flamboyantes, dans une succession de garages aux portes multicolores et
vermoulues... le tout, entremêlé sans cohérence, comme accumulé sans plus
d'égard par un collectionneur fou...
Diverse en sa population : si les faubourgs
industriels ont une odeur de souffre et de rings de boxe, quelques ruelles
périphériques au centre semblent préférer la cire, abritant des chats à
grand-mère lovés au coin des fenêtres qu'ils se partagent avec quelque ancienne
plante verte à l'abri des rideaux. Ailleurs, des matelas de jeunes amoureux
sont posés sur les tôles ondulées de toits plats, façon dolce vita...
Des enfants peuplent l'espace des cours de terre battue
de leur imagination infinie, des vieillards dérivent sur la jetée, pas à pas,
puis s'échouent sur des bancs de bois quelques heures durant... et les parents,
sous les pins du rivage, assistent assis côte à côte aux jeux de leur
progénitures sur des châteaux de plastique surgonflés, aux couleurs
éclatantes...
Le visiteur extérieur aurait ainsi tort de se laisser
attrister par ces rues aux pavés inégaux, aux marches d'escalier rabotées, aux
façades grignotées... car contrairement aux faubourgs périphériques, cet état
ambiant de délabrement semble être secondaire, ou d'une manière différente,
'assumé'.
Comme si, au fond, l'important était ailleurs.
Comment ne pas témoigner ?
…
Le soir. Sur la chaussée rebondie d'une rue de galets,
un vieillard se promène. Pantalon de grosse toile lâche, pieds nus dans des
sandales, il se promène sous les tilleuls, le long de façades usées. Maillot
jeté par dessus son épaule, il se promène ainsi, torse-nu, lentement, et
s'arrête parfois lorsqu'il croise une connaissance.
Les amoureux ont tiré une couverture sur les toits...
regard tantôt tournés sur les pages d'un livre partagé, tantôt vers le ciel où
ils écrivent l'avenir.
Des chants aussi...
… d'enfants, d'anciens...
… dans les cours, sur les bancs...
… des chants toujours.
… une fois de plus, le réflex(e) sera le plus fort...
…
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